La rédaction du Lundi CAMES a le plaisir de vous proposer désormais une nouvelle rubrique qui met en relief nos Institutions d’Enseignement Supérieur et de Recherche (IESR).
Pour cette première rubrique, nous vous invitons à découvrir l’Université de N’Djaména à travers une interview accordée par son Président, Dr (MC) MAHAMAT Saleh Daoussa HAGGAR.
Bonne lecture!


Dr (MC) MAHAMAT Saleh Daoussa HAGGAR
Président de l’Université de N’Djaména (TCHAD)
Monsieur le Président, merci de vous présenter à nos lecteurs:
Je suis MAHAMAT SALEH DAOUSSA HAGGAR, Maître de Conférences en Mathématiques, Président de l’Université de N’Djaména. Je suis, par ailleurs, le deuxième rapporteur du Comité Consultatif Général (CCG) du Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur (CAMES).
Pouvez-vous nous présenter votre Université et les filières ?
Institution publique d’Enseignement supérieur la plus ancienne et la plus importante du Tchad tant par la diversité de ses offres de formation que par le nombre de ses étudiants, la qualité et les effectifs de son corps professoral, l’Université de N’Djaména a été créée par Ordonnance n°26/PR/71 du 27 décembre 1971 sous l’appellation « Université du Tchad ». Elle sera rebaptisée « Université de N’Djaména » par Loi n°006/PR/94 du 17 janvier 1994.
Outre l’Institut Confucius, la Branche d’Alexandrie, la Bibliothèque Universitaire, l’Observatoire du Foncier du Tchad et le Centre de Santé Universitaire (CSU), l’Université de N’Djaména compte aujourd’hui neuf (9) établissements dont sept (7) Facultés et deux (2) Écoles Doctorales, quarante-un (41) Départements et treize (13) Formations Doctorales. Elle offre une large gamme de formations couvrant plusieurs domaines : sciences exactes et appliquées, sciences humaines et sociales, santé, droit, économie, gestion, ingénierie et agriculture. Nos filières sont en constante évolution pour répondre aux besoins socioéconomiques du pays et aux exigences internationales en matière d’Enseignement supérieur.
L’Université de N’Djaména compte ensuite six cent (600) Enseignants-chercheurs et deux cent vingt-deux (222) agents administratifs, techniques et main-d’œuvre.
L’Université de N’Djaména compte enfin, au titre de l’année académique 2023-2024, 31 568 étudiants dont 23 013 garçons et 8 555 filles.
Quels sont les innovations et particularités implémentées par votre Université ?
Structure académique à caractère administratif, dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière, l’Université de N’Djaména a aujourd’hui 54 ans et se doit, à ce titre, de se moderniser en changeant de logiciel, c’est-à-dire en adoptant des paradigmes qui tiennent résolument compte de nouvelles économies et de nouvelles intelligences. Aussi, a-t-elle été contrainte, en dépit de ses ressources humaines, matérielles et financières très limitées, de se doter d’un Manuel des procédures et d’un Plan Stratégique de Développement, tous deux adoptés au cours du Conseil d’Administration du 06 janvier 2024.
Nous avons initié plusieurs réformes et innovations, notamment :
- la Vision 2040, qui prévoit une expansion majeure de nos infrastructures et l’accroissement de notre capacité d’accueil à 150 000 étudiants,
- le développement de nouvelles infrastructures : amphithéâtres modernes, laboratoires équipés, centre de santé universitaire, et bibliothèques numériques,
- l’intégration de l’enseignement numérique, avec des plateformes d’apprentissage en ligne et des outils pédagogiques modernes,
- l’amélioration des partenariats académiques et scientifiques, tant au niveau régional qu’international, pour renforcer la mobilité des étudiants et enseignants,
- l’accent mis sur la Recherche appliquée et l’Innovation, avec des laboratoires travaillant sur des problématiques locales et globales.
Quels sont les grands défis auxquels vous faites face ?
En dépit des avancées énumérées plus haut, l’Université de N’Djaména fait face à plusieurs défis :
- l’insuffisance de financement : non seulement, l’Université est sous-financée, elle manque de ressources additionnelles pour le financement des projets de développement innovants et stratégiques ;
- le déficit infrastructurel : l’insuffisance d’infrastructures face à l’augmentation fulgurante du nombre d’étudiants entraînant un déséquilibre notoire entre la capacité d’accueil et la demande de formation. ;
- l’insuffisance de ressources humaines qualifiées : l’Université de N’Djaména manque de ressources humaines de rang magistral (Maîtres de Conférences et Professeurs Titulaires) pour couvrir toutes les Formations Doctorales ;
- l’insuffisance de ressources matérielles et numériques : il importe de relever un sous équipement des laboratoires ainsi qu’une instabilité notoire de connexion internet à l’Université de N’Djaména malgré les efforts annuellement fournis par les responsables de l’Institution;
- le déficit énergétique : l’Université de N’Djaména manque constamment d’électricité. Or, aucune Université au monde ne peut fonctionner aujourd’hui sans électricité ;
- le parachèvement du processus de digitalisation enclenché depuis trois années consécutives. Il s’agit de l’intégration des TIC dans l’enseignement et l’adaptation aux nouvelles technologies ;
- l’amélioration de la qualité de la Recherche et de la valorisation des résultats scientifiques.
Si vous deviez faire un bilan de l’année 2024, quelles ont été les grandes lignes à mettre en avant ?
- L’adoption du Manuel de Procédures et du Plan Stratégique de Développement de l’Université : l’Université de N’Djaména dispose désormais, pour la première fois, d’un Manuel de Procédures et d’un Plan Stratégique de Développement. Nous pensons en faire bon usage pour les prochaines années.
- L’organisation des premières soutenances de doctorat académique au Tchad : l’Université de N’Djaména a toujours organisé les soutenances de doctorat de Médecine et de Pharmacie. Les premières soutenances de thèse de doctorat/Ph. D se sont déroulées du 15 au 20 janvier 2024. Quarante-sept (47) doctorants ont présenté et soutenu avec brio leurs thèses de doctorat dont vingt-six (26) en Sciences, Techniques et Environnement et vingt- un (21) en Lettres, Sciences Humaines et Sociales.
- L’organisation de la session du Comité Consultatif Général du CAMES : la session du Comité Consultatif Général (CCG) du CAMES s’est déroulée du 26 au 28 février 2024. Plusieurs Recteurs/Présidents et Directeurs Généraux des Institutions d’Enseignement Supérieur et de Recherche nationales, sous-régionales et régionales se sont réunis au Ministère des Affaires Étrangères.
- L’organisation du deuxième Forum de digitalisation de l’Université : le deuxième Forum de digitalisation s’est déroulé le 05 mars 2024 à la Faculté des Sciences de la Santé Humaine. Plus de deux cents (200) personnes, notamment responsables d’Institutions d’Enseignement Supérieur et de Recherche, partenaires techniques et financiers, partenaires sociaux, Enseignants-chercheurs, Chercheurs et étudiants y ont pris part.
- L’organisation d’un atelier de renforcement des capacités des responsables de l’Université : l’atelier de renforcement des capacités des responsables a porté sur les modules ci-après : la pédagogie universitaire, l’Assurance Qualité Institutionnelle et la gouvernance universitaire. Tous les responsables de l’Université de N’Djaména ont bénéficié de cette formation.
- L’organisation de la Conférence Internationale sur les Mathématiques et leurs Applications dans les pays en voie de Développement : par le biais du Laboratoire de Modélisation, Mathématiques, Informatique, Applications et Simulation (L2MIAS), la Faculté des Sciences Exactes et Appliquées de l’Université de N’Djaména a accueilli, du 04 au 05 novembre 2024, la Conférence Internationale sur les Mathématiques et leurs Applications dans les pays en voie de Développement (CIMAD). Il a été question, au cours de ces deux jours d’intenses échanges, d’explorer l’importance des Mathématiques pour le développement des pays en voie de développement.
- L’organisation de l’École du Centre International de Mathématiques Pures et Appliquées : du 21 octobre au 1er novembre 2024, la Faculté des Sciences Exactes et Appliquées de l’Université de N’Djaména, par le biais du Laboratoire de Modélisation, Mathématiques, Informatique, Applications et Simulation (L2MIAS), a organisé l’École du Centre International de Mathématiques Pures et Appliquées (CIMPA) sur la modélisation d’écoulement des fluides et environnement.
- L’organisation de la Conférence Internationale sur les Mathématiques et leur Applications dans les pays en voie de Développement : l’Université de N’Djaména inaugure son centre de santé universitaire le 29 octobre 2024. Rénové et équipé, le centre bénéficie, en même temps, d’un personnel qualifié et compétent et de deux ambulances médicalisées.
- Le lancement du Projet de Développement de l’Enseignement Supérieur au Tchad (PRODEST) : les 3 et 4 décembre 2024, l’Université de N’Djaména a pris part activement au lancement officiel du Projet de Développement de l’Enseignement Supérieur au Tchad (PRODEST) financé par la Banque Islamique de Développement (BID). Ce projet de plusieurs milliards de dollars vise à financer plusieurs Institutions de l’Enseignement supérieur dont l’Université de N’Djaména. Les axes du PRODEST sont orientés sur le financement des bourses de recherche des doctorants et Enseignants-chercheurs, la construction des infrastructures, la formation du personnel, etc.
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La signature d’une Convention de partenariat avec l’Office Nationale pour la Promotion de l’Emploi : l’Université de N’Djaména a conclu, le 16 décembre 2024, une Convention de partenariat avec l’Office National pour la Promotion de l’Emploi (ONAPE). Cette Convention constitue, pour l’Université, un bond important en avant en ce sens qu’elle porte sur l’insertion professionnelle des diplômés.
- La consolidation des partenariats académiques, avec des collaborations accrues avec des Institutions de renom ;
- Le renforcement des capacités des enseignants et du personnel administratif à travers des formations spécialisées ;
- Le développement de nouveaux cursus et filières adaptées aux besoins du marché du travail.
En termes de perspectives, quels sont les projets et grandes activités ?
Nos ambitions pour les prochaines années s’articulent autour de plusieurs axes :
- la poursuite du programme Vision 2040, avec l’agrandissement de notre Université et la modernisation de ses infrastructures,
- le renforcement de la Recherche, avec la création de pôles d’excellence et de laboratoires spécialisés,
- la formation et le recrutement de nouveaux Enseignants-chercheurs pour améliorer l’encadrement académique,
- la digitalisation accrue de l’enseignement, avec le développement de plateformes d’e-learning et de bibliothèques numériques,
- l’internationalisation, en multipliant les accords de coopération et les échanges avec d’autres universités.
Un dernier mot pour les lecteurs ?
L’Université de N’Djaména est en pleine transformation et aspire à devenir une référence en Afrique centrale. Nous invitons tous les acteurs, étudiants, enseignants, partenaires et autorités, à nous accompagner dans cette dynamique. Ensemble, bâtissons une Université d’excellence au service du développement du Tchad et du continent africain.